Terrorisme au Burkina : « On peut faire de GO PAGA un programme de tous les burkinabè » dixit Fadima Kambou

Terrorisme au Burkina :  « On peut faire de GO PAGA un programme de tous les burkinabè » dixit Fadima Kambou

Vêtue d’un t-shirt couleur rose brandé GO PAGA, assise face à son ordinateur, sourire aux lèvres, Madame Fadima Kambou, initiatrice du Programme GO PAGA, une initiative d’accompagnement des veuves et orphelins des militaires tombés au front dans la lutte contre le terrorisme nous a reçu le 13 août 2021 dans son bureau partagé avec ses collègues [ndlr : des bénévoles pour la plupart]. Son sourire ne cache pourtant pas son impatience de parler et surtout tout l’amour et l’estime placé dans l’écriture de chaque mot de ce programme jusqu’à sa mise en œuvre. Logique, faut le rappeler par amour, cette ancienne responsable ressources humaines d’une importante société internationale a rendu sa démission afin de se consacrer à ce projet qui lui tient à cœur. Durant cet entretien plein d’émotion, la mère de famille, l’épouse d’un ancien de l’école militaire (PMK), la femme engagée était à cœur ouvert. Son cri de cœur l’union sacrée autour des veuves et orphelins des militaires tombés au front pour la défense de la partie. Lisez plutôt !

 

Elites Femmes (EF) : Présentez-nous brièvement le Programme GO PAGA

Fadima KAMBOU (FK) : GO PAGA est un programme d’accompagnement des veuves et des orphelins de nos militaires qui sont tombés au front. C’est un programme qui apprend aux ayants droits de nos soldats tombés au front afin de leur permettre de vivre tranquillement, en toute quiétude à Ouaga ou dans les différentes zones du Burkina Faso.

Il s’agit d’un programme qui apprend à leurs ayants droits à pêcher. Ce programme ne donne pas de poisson. Le but, c’est vraiment permettre à ces familles surtout les conjointes à pouvoir avoir une activité, des services pour pouvoir prendre soin de leurs enfants dans le long terme et ne plus avoir à tendre la main.

 

Quel état des lieux faites-vous à ce jour du programme dont vous êtes l’initiatrice ?

Nous avons démarré ce programme à travers un projet pilote au sein de l’unité spéciale de la Gendarmerie Nationale du Burkina Faso. Nous avons pris en charge 7 veuves, 7 orphelins et une adolescente de 15 ans. Au jour d’aujourd’hui toutes ces femmes ont une activité. Une est institutrice en stage à Bobo Dioulasso. GO PAGA a prospecté en vue de la placer. Nous lui payons au minimum le SMIG, le temps qu’elle puisse se former. Nous avons de bonnes nouvelles par ce que l’école souhaite l’intégrée pour la rentrée prochaine. On attend la confirmation ainsi que les documents qui vont avec.

Il y a une autre qui est en stage de fin d’étude. La concernant nous avons également prospecté et la placer en entreprise en tant que gestionnaire de projet. Elle a bénéficié de renforcements de capacités en Word, Excel et d’un accompagnement dans ses recherches. Nous l’aidons à préparer son mémoire. 

Toujours au titre des acquis nous avons accompagné une veuve qui préparais son Baccalauréat dans la ville de Pô. Elle l’a réussi avec une moyenne de 12,95. Nous avons aussi accompagné l’adolescente qui est en classe de seconde mais qui avait démarré avec une faible moyenne, elle finit l’année avec une moyenne de 11,95 avec l’appui de Go PAGA. Elle a un soutien scolaire et mène parallèlement des activités avec nos bénévoles.

 

Etes-vous satisfaites de l’évolution du Programme GO PAGA après le lancement de la phase de couverture nationale du programme ? 

Je suis satisfaite par ce que ces familles sont transformées aujourd’hui. Elles ont quitté un point A pour aller vers un point B. Nous allons continuer le suivi sur une année par ce que dans le programme il y a certes le placement mais derrière on suit les familles. Il y a une satisfaction avec mes équipes c’est pourquoi aujourd’hui nous sommes sur le niveau national. On va s’occuper de toutes les veuves et orphelins des militaires tombés au front du Burkina Faso. Nous sommes pour cela très reconnaissant car tout se passe bien.

 

Quelles sont les difficultés rencontrées ?

Nous n’allons pas parler de difficultés mais plutôt de défis. Nous venons de quitter d’une phase pilote financer à majorité en fonds propres avec l’accompagnement de beaucoup de bénévoles, des consultants, une agence de communication vers la phase nationale. Donc, il y a du besoin. Nous sommes à la recherche de partenaires locaux et aussi de pays amis. Il s’agit donc de défis de mobilisation de ressources aujourd’hui, de recherche de partenaires que de difficultés dans la mise en œuvre pratique du programme.

Quel est votre cri de cœur aujourd’hui ?

Le Burkina traverse des difficultés. Et à mon avis, que ce soit pour le programme GO PAGA ou pas, nous devons tous participer à notre niveau quelques soit nos croyances, nos opinions, accompagner l’Etat à faire face. Ce problème que nous vivons au Burkina qui est celui de l’insécurité nous concerne tous. Mettons en place des actions. Ceux qui veulent, peuvent accompagner GO PAGA ou même d’autres programmes avec des actions au profit du pays en attendant que les choses se fassent. Pas jeter des responsabilités sur qui que ce soit mais dire oui aux actions. Face à ce problème qu’est-ce que je peux apporter et quelle est la pierre que je peux poser à l’édifice ? C’est de cela qu’il s’agit. 

 

Quel appel avez-vous à lancer à l’endroit des burkinabè pour plus de solidarité à l’endroit des veuves ?

GO PAGA, je l’ai initié par ce que je suis mariée à un ancien du PMK qui a des frères d’armes. Je suis régulièrement entourée de femmes de militaires. Ma voisine de maison son mari va régulièrement au front par ce qu’il est Commandant. Et quand tu vois ces femmes prier pour leur époux pendant qu’ils sont au front, s’occuper des enfants pendant que leurs hommes se battent pour que nous nous puissions vivre tranquillement et aller boire une bière en toute quiétude, et que nos enfants puissent aller à l’école, alors je me dis qu’on a le devoir de participer. Et participer n’est pas forcement que financièrement. On peut faire de GO PAGA un programme de tout les burkinabè. Le programme n’appartient pas uniquement à Madame Kambou, par ce qu’elle en ait l’initiatrice mais, mon rêve est que la jeunesse burkinabè se mobilise pour que l’on puisse l’offrir à l’Etat burkinabè. C’est aussi cela rendre utile la jeunesse et faire rêver nos enfants. J’invite tout monde à aller sur notre site internet et prendre connaissance de ce que l’on fait afin de vous joindre à la dynamique. Faites vos remarques, achetez les produits alimentaires produits ainsi que les savons fabriqués par ces veuves c’est aussi participer. Pour les entreprises au-delà de l’appui financier, elles peuvent ouvrir leurs portes pour des stages ou l’emploi des veuves que nous allons former.

 

Un mot à l’endroit des veuves et orphelins des militaires tombés dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ?

Je ne peux que les encourager. Par ce que le deuil est personnel. GO PAGA, nous sommes là pour eux. Et nous allons faire notre nécessaire afin que le pays puisse les accompagner. Je les invite à aller chercher à pécher mais pas qu’on leur donne le poisson. Je les encourage à prendre du courage et se dire, aujourd’hui je suis père et mère et je vais aller chercher des solutions durables. On souhaite que d’autres programmes les accompagnent. Mais l’objectif c’est qu’elles soient autonomes à long terme. Que Dieu les bénisse, Que Dieu bénisse le Burkina Faso et nos autorités.

Je vous remercie

Entretien réalisé par Balguissa Sawadogo